vendredi 28 mai 2010

Bazar littéraire - Gainsbourg et ses vents

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Nouvel épisode du Bazar Littéraire, le troisième déjà.

Au programme, le livre de Serge Gainsbourg, Eugénie Sokolov. Un conte parabolique étonnant.




jeudi 27 mai 2010

Extrait - Finkielkraut et le préjugé

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Redirection en htm Aujourd'hui, petit détour par l'un de nos contemporains, Alain Finkielkraut. Plus penseur, essayiste, que philosophe, Finkielkraut reste pourtant une figure intellectuelle intéressante de notre époque. Dans son ouvrage, La Défaite de la pensée, on peut lire une critique de ce temps qui ne cesse de renier ses fondements, la culture et donc son identité, pour des données marchandes. En clair, l'éradication de ce qui n'est pas dans le marché par le marché.

Dans l'extrait qui suit, Finkielkraut nous parle des contre-révolutionnaires et du préjugé comme fédération d'un peuple. Là où les philosophes ne voient qu'un ennemi à combattre. Une critique rare dans une époque où le milieu scolaire ne cesse de chérir les philosophes des Lumières.

Alain défend les préjugés

"En proclamant leur amour du préjugé, contre-révolutionnaires français et romantiques allemands réhabilitent le terme le plus péjoratif de la langue des Lumières, et - comble d'audace, provocation suprême - ils l'élèvent à la dignité de culture. Ce n'est pas, disent-ils, l'obscurantisme qui fleurit sur le sommeil de la raison individuelle, c'est la raison collective. Présence du "nous" dans le "je" et de l'antérieur dans l'actuel, véhicules privilégiés de la mémoire populaire, sentences transmises de siècle en siècle, intelligence d'avant la conscience et garde-fous de la pensée - les préjugés constituent le trésor culturel de chaque peuple. Sous prétexte de répandre les Lumières, les philosophes se sont acharnés contre ces précieux vestiges. Au lieu de les chérir, ils ont voulu les détruire. Et, non contents de s'en défaire pour leur propre compte, ils ont exhorté le peuple à les imiter."

dimanche 23 mai 2010

Extrait - Proust et Combray

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Redirection en htm Pour bien commencer la semaine, je me suis dis qu'un peu de Proust ne ferait de mal à personne. L'introduction de Du côté de chez Swann est un petit bijou d'élégance qu'il ne faut pas hésiter à relire. Le narrateur, débutant ce long cycle d'A la recherche du temps perdu, évoque ses nuits.

On a rarement eu l'occasion de lire d'aussi belles lignes sur le sommeil, la lecture. Ce léger basculement du monde réel à celui des rêves, l'angoisse même que peut provoquer ce changement d'état. De l'éveil au sommeil. Proust nous décrit tout cela avec style, illustrant cette lutte en utilisant ces fameuses phrases. Longues, proposant des arrêts plus ou moins longs, permettant au lecteur de se poser quelques instants avant de repartir, dans l'attente que la phrase se termine. C'est le génie de Proust. De longues phrases, incroyablement construites, qui manquent toujours de s'écrouler mais ne chutent jamais.

Marcel va encore passer une mauvaise nuit

"Longtemps, je me suis couché de bonne heure. Parfois, à peine ma bougie éteinte, mes yeux se fermaient si vite que je n’avais pas le temps de me dire : « Je m’endors. » Et, une demi-heure après, la pensée qu’il était temps de chercher le sommeil m’éveillait ; je voulais poser le volume que je croyais avoir encore dans les mains et souffler ma lumière ; je n’avais pas cessé en dormant de faire des réflexions sur ce que je venais de lire, mais ces réflexions avaient pris un tour un peu particulier ; il me semblait que j’étais moi-même ce dont parlait l’ouvrage : une église, un quatuor, la rivalité de François Ier et de Charles-Quint. Cette croyance survivait pendant quelques secondes à mon réveil ; elle ne choquait pas ma raison, mais pesait comme des écailles sur mes yeux et les empêchait de se rendre compte que le bougeoir n’était pas allumé. Puis elle commençait à me devenir inintelligible, comme après la métempsycose les pensées d’une existence antérieure ; le sujet du livre se détachait de moi,
j’étais libre de m’y appliquer ou non ; aussitôt je recouvrais la vue et j’étais bien étonné de trouver autour de moi une obscurité, douce et reposante pour mes yeux, mais peut-être plus encore pour mon esprit, à qui elle apparaissait comme une chose sans cause, incompréhensible, comme une chose vraiment obscure. Je me demandais quelle heure il pouvait être ; j’entendais le sifflement des trains qui, plus ou moins éloigné, comme le chant d’un oiseau dans une forêt, relevant les distances, me décrivait l’étendue de la campagne déserte où le voyageur se hâte vers la station prochaine ; et le petit chemin qu’il suit va être gravé dans son souvenir par l’excitation qu’il doit à des lieux nouveaux, à des actes inaccoutumés, à la causerie récente et aux adieux sous la lampe étrangère qui le suivent encore dans le silence de la nuit, à la douceur prochaine du retour."

jeudi 20 mai 2010

Bazar littéraire - Molière et les fâcheux

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Nouvel épisode du bazar littéraire. Au programme, Molière et les fâcheux. Une plongée dans l'univers du Molière moraliste.


mardi 18 mai 2010

Le concert surprise - première étape d'un roman en construction

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J'évoquais, dès le premier billet de ce blog il me semble, le suivi pas à pas de l'écriture d'un roman. Je commence dès aujourd'hui. Je suis retombé il y a peu sur quelques chapitres écrits il y a 4 ou 5 ans. Après relecture, je me suis dis qu'il était bête de laisser tomber ces quelques pages. Du coup, j'ai commencé une refonte totale de ces prémisses d'un roman. Aujourd'hui, le narrateur du roman se rend à un concert improvisé après avoir reçu un coup de téléphone d'une ancienne amie. Il s'y rend, subit la bouillie musicale des musiciens amateurs, et termine la soirée dans l'appartement d'un des musiciens. Cet extrait décrit la découverte de l'appartement par notre brave narrateur.

Le début de la souffrance

"On arriva enfin à l'appartement de Baptiste. Il vivait en collocation, comme beaucoup de gens de son espèce. Le genre de compromis médiocre qu’aime à mettre en avant les petits bourgeois avides d’indépendance. Une indépendance qui ne tient que par le vernis dont elle est enduite. Bien évidemment. Ca puait la clope, la sueur, le renfermé et même la gerbe dans certaines pièces. Baptiste et sa colocataire vivaient au milieu des CDs, des vinyles, des instruments de musique et des bières à moitié ouvertes. Une vraie porcherie indigne d’un être humain. Mais tout à fait adéquate pour un artiste type underground.

Dans le salon, on pouvait voir une table basse transparente, légèrement fêlée sur les côtés et globalement crade. Des ronds de crasse, disposées irrégulièrement sur la vitre, constituaient des témoignages fébriles d’anciennes beuveries. En face, un canapé un peu déglingué faisait office de « pose-culs ». La fesse frôlant à peine le tissu, on se sentait partir comme à la renverse. Aspiré par une entité molle qui n’avait pu lieu d’être. Disposés un peu partout, des sièges cherchaient à masquer le vide de cet antre.

Après le salon, ce fut au tour de la cuisine. Le carrelage n’était pas des plus brillants. Les jointures viraient marron. Le micro-onde était moucheté de tâches de sauce, les boites vides s'empilaient, sur la table de la cuisine ou sur le sol. Baptiste avait une certaine notion de l’hygiène qui avait de quoi surprendre. Une sorte de résurgence du baba-cool dans les années 2000. Un anachronisme à éradiquer comme un furoncle sur un postérieure.

Me dirigeant de nouveau vers le salon, je découvris la fameuse colocataire. Un joint dans les mains. Du bout des doigts, telle une fétichiste, elle cherchait à garder le plus longtemps possible son précieux objet. Elle tirait dessus à intervalle régulier, les yeux déjà rouges, l’air hébété. On pouvait dire qu’elle planait depuis un bon bout de temps.

Une fois que nous fûmes tous installés, Baptiste proposa une pizza à ceux qui en voulaient. Il était déjà 1 heure du matin. Vu l’état de la cuisine, je me suis dis que m’abstenir n’était pas une mauvaise chose. De la tête, je déclinai la proposition. Par contre, pour la bière, je n’hésitai pas un instant. Le cul vissé sur un haut tabouret noir, en cuir déchiré, j’observais tel un Zarathoustra de fortune la décadence festive d’une jeunesse ectoplasmique."

lundi 17 mai 2010

Extrait - Chateaubriand et la révolution barbare

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Redirection en htm J'avais envie de vous parler un peu de Chateaubriand aujourd'hui. Les Mémoires d'outre-tombe est probablement l'œuvre la plus riche, la plus intéressante, de l'écrivain romantique. En presque 3 000 pages, François-René nous raconte sa vie comme s'il s'agissait d'un roman fleuve, un de ces romans-feuilletons à la Dumas. Avec de nombreux rebondissements et des voyages incroyables.

L'extrait que j'ai choisi n'est pas le plus connu mais demeure fort intéressant sur plusieurs points. Chateaubriand revient à Paris en 1800, la révolution française n'est plus. Seulement, par cette description chargée, on retrouve un lexique de la désolation admirable, Chateaubriand nous fait le compte-rendu d'un monde en ruine. C'est la barbarie des idéaux qu'il cherche à dépeindre, en pointant du doigt les stigmates de ces tristes moments. L'utilisation de la devise républicaine, détournée et arrivant en plein milieu du paragraphe, reste également un modèle d'intelligence. L'écrivain construit son environnement pour mieux mettre à bas cette phrase célèbre, incarnant désormais un idéal devenu une barbarie.

Chateaubriand méprise la révolution française

"A droite et à gauche du chemin, se montraient des châteaux abattus; de leurs futaies rasées, il ne restait que quelques troncs équarris, sur lesquels jouaient des enfants. On voyait des murs d'enclos ébréchés, des églises abandonnées, dont les morts avaient été chassés, des clochers sans cloches, des cimetières sans croix, des saints sans tête et lapidés dans leurs niches. Sur les murailles étaient barbouillées ces inscriptions républicaines déjà vieillies : Liberté, Egalité, Fraternité ou la Mort. Quelquefois on avait essayé d'effacer le mot Mort, mais les lettres noires ou rouges reparaissaient sous une couche de chaux. Cette nation, qui semblait au moment de se dissoudre, recommençait un monde, comme ces peuples sortant de la nuit de la barbarie et de la destruction du Moyen Age."

jeudi 13 mai 2010

Extrait - Nietzsche et les Français

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Redirection en htm On peut trouver étrange que je parle aujourd'hui d'un philosophe dans un blog qui se veut pourtant littéraire. Seulement, je ne parle pas de n'importe qui mais de Nietzsche, notre nihiliste adoré. C'est en parcourant rapidement son livre Par-delà le bien et le mal que j'ai pu relever quelques passages bien sentis du philosophe allemand. Au-delà de la pertinence des idées, on aime chez Nietzsche son écriture qu'on pourrait qualifier, au risque de choquer les puristes, de littéraire.Un peu comme Rousseau.

Lire du Nietzsche demande un effort de réflexion, d'incessants retours mais l'exercice reste agréable grâce à ce talent de styliste de Friedrich. Pour rester dans les philosophes allemands, on obtiendrait, au mieux, un mal de crâne en lisant Kant là où Nietzsche arrive à dessiner un sourire sur notre visage. Le passage que j'ai choisi aujourd'hui nous concerne puisque notre philosophe teuton parle des Français. Un éloge finalement pas si daté si l'on considère notre époque avec un œil intransigeant.

Nietzsche aime la France

"Aujourd'hui encore, la France est le refuge de la culture la plus intellectuelle et la plus raffinée qu'il n'y ait en Europe et reste la grande école du goût : mais il faut savoir la découvrir, cette "France du goût". Qui en fait partie prend soi de se tenir caché : - ils sont peu nombreux et dans ce petit nombre, il s'en trouve encore, peut-être, qui ne sont pas très solides sur jambes, soit des fatalistes, des mélancoliques, des malades, soit encore des énervés et des artificiels, qui mettent leur zèle à rester cachés".

mercredi 12 mai 2010

Bazar littéraire - Bukowski et son journal intime

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J'inaugure aujourd'hui un petit rendez-vous concernant la littérature, cette fois-ci sous forme de vidéos. Bazar littéraire, ce sera pour moi l'occasion de critiquer quelques livres ou vous faire découvrir les grands moments de l'histoire de la littérature.

Aujourd'hui, j'ai décidé de vous parler de ce brave Charles Bukowski et de son journal intime. Œuvre posthume mineure mais pas inintéressante.



A bientôt

jeudi 6 mai 2010

Le lâche et le résistant de papier

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Il est déplorable de voir comment l'on traita Céline après la seconde guerre mondiale. La polémique la plus connue, et probablement une des plus emblématiques, est celle qui confronta notre grand styliste français au philosophe Jean-Paul Sartre. L'homme qui se trompa sur à peu près tout à propos de son siècle. Céline, dans un texte admirable, giflait admirablement ce dictateur de la pensée unique qui réclamait sa tête, et ce n'est pas une image, en le qualifiant d'"agité du bocal".

 Céline nous parle de sa correspondance

C'est en lisant Nord, livre s'inscrivant dans la trilogie allemande de Céline, retraçant son périple en Europe durant la seconde guerre mondiale, que je découvris ce passage amusant dans lequel Ferdinand nous évoque son courrier. Et c'est à travers ces quelques lettres que se dresse, un peu comme Molière pouvait le faire dans ses pièces, la peinture morale des hommes. L'élaboration d'un stéréotype pertinent. Le lâche n'hésitant jamais à sauter d'un camp à l'autre pour éviter au maximum les coups de bâton.

"Je vois encore aujourd'hui même je reçois des lettres de menaces très horribles, vingt ans après, de personnes qui n'étaient pas nées...il va de soi, j'ai bien l'habitude!...je note à propos, que les lettres de menaces les plus agressives ne sont jamais signées...tandis que les lettres de l'autre bord, d'admirateurs tant que ça peut, portent toutes, les noms et adresses...gentils amateurs d'autographes!...rigolo, c'est que peut-être ce sont les mêmes qui vous préviennent qu'ils vont venir vous mettre en pièces et puis l'autre semaine, d'une autre écriture, vous trouvent l'incomparable génie qu'ils se désolent et pleurent nuit et jour à penser combien l'humanité tellement abjecte vous a traité et vous traite...beaucoup plus mal que le dernier des parricides...il faut de tout pour faire un monde, et plus que tout dans le même être...à comprendre, vous avez bonne mine!"

La résonance de cette énième digression de Céline dans le texte fait forcément penser à ces résistants de papier qui s'inventent aujourd'hui des combats, s'insurgent contre des fantômes faute de comprendre la réalité de leur temps. Ces jeunes imbéciles, qui couvent la naïveté de leur âge sous des apparats crasseux, devraient comprendre que se battre contre le nazisme ou le fascisme, avec une conception digne des années 40, est aussi inutile qu'absurde.

 Ils sont redoutables car ils ne comprennent rien

lundi 3 mai 2010

Cioran et les philosophes

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La découverte de Cioran en terminale fut assez redoutable pour moi. Alors que je me creusais la tête pour comprendre des textes philosophiques, cherchant à connaitre l'intérêt même de cette discipline, je découvris un jour Cioran. Plus précisément, la préface de son premier livre, Sur les cimes du désespoir. En quelques mots, le jeune philosophe montrait toute la vacuité de la philosophie en la confrontant à un ennemi de taille, la douleur. Même si Épicure pense que ce prestigieux domaine "soigne l'âme", force est de reconnaître que cette guérison connait rapidement ses limites.

Cioran, un philosophe contre la philosophie

"J'ai écrit ce livre en 1933 à l'âge de vingt-deux ans dans une ville que j'aimais, Sibiu, en Transylvanie. J'avais terminé mes études et, pour tromper mes parents, mais aussi pour me tromper moi-même, je fis semblant de travailler à une thèse. Je dois avouer que le jargon philosophique flattait ma vanité et me faisait mépriser quiconque usait du langage normal. A tout cela un bouleversement intérieur vint mettre un terme et ruiner par là même tous mes projets.

Le phénomène capital, le désastre par excellence est la veille ininterrompue, ce néant sans trêve. Pendant des heures et des heures je me promenais la nuit dans des rues vides ou, parfois, dans celles que hantaient des professionnelles, compagnes idéales dans les instants de suprême désarroi. L'insomnie est une lucidité vertigineuse qui convertirait le paradis en un lieu de torture. Tout est préférable à cet éveil permanent, à cette absence criminelle de l'oubli. C'est pendant ces nuits infernales que j'ai compris l'inanité de la philosophie. Les heures de veille sont au fond un interminable rejet de la pensée par la pensée, c'est la conscience exaspérée par elle-même, une déclaration de guerre, un ultimatum infernal de l'esprit à lui-même. La marche, elle, vous empêche de tourner et retourner des interrogations sans réponse, alors qu'au lit on remâche l'insoluble jusqu'au vertige.

Voilà dans quel état d'esprit j'ai conçu ce livre, qui a été pour moi une sorte de libération, d'explosion salutaire. Si je ne l'avais pas écrit, j'aurais sûrement mis un terme à mes nuits."

Sur les cimes du désespoir, de Cioran