lundi 28 juin 2010

Extrait - Jean Lorrain et les mondains

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Redirection en htm Jean Lorrain fait parti de ce courant littéraire que l'on appelle le Décadentisme. On retrouve dedans des écrivains plus connus comme Barbey d'Aurevilly ou Huysmans. Dandys bien souvent, mélancoliques voire nihilistes, ils marquent les esprits grâce à une écriture raffinée doublée d'un vrai désespoir.

Dans son livre, Monsieur de Phocas, Lorrain nous décrit son personnage principal comme sujet à des pulsions meurtrières. Voyant des masques partout, il développe une haine incroyable pour ses congénères et rêve de tuer quelqu'un. Le passage qui suit retranscrit le virulent portrait des mondains que fréquente le protagoniste.

Jean Lorrain, un vrai décadent

"Depuis que je le connais, la présence des autres m'est devenue plus intolérable encore, leur conversation surtout ! Oh ! comme elle m'angoisse et comme elle m'exaspère, et leur attitude, et leur façon d'être, et tout, et tout !... Les gens de mon monde, mes tristes pareils, comme tout ce qui vient d'eux m'irrite, m'attriste et m'oppresse, leur vide et bruyant bavardage, leur perpétuelle et monstrueuse vanité, leur effarant et plus monstrueux égoïsme, leurs propos de club !
Oh ! le ressassage des opinions toutes faites et des jugements appris, le vomissement automatique des articles lus, le matin, dans les feuilles et qu'on reconnaît au passage, leur désespérant désert d'idées, et là-dessus l'éternel plat du jour des clichés trop connus sur les écuries de courses et les alcôves des filles...et les loges des petites femmes ! Les petites femmes, autre loque de langage, la sale usure de ce terme avachi !
Ô mes contemporains, mes chers contemporains,... leur idiot contentement d'eux-mêmes, leur suffisance épanouie et grasse, le stupide étalage de leurs bonnes fortunes, les vingt-cinq et cinquante louis sonnant de leurs prouesses tarifées toujours aux mêmes chiffres, leurs gloussements de poules et leurs grognements de porcs, quand ils prononcent le nom de certaines femmes, l'obésité de leurs cerveaux, l'obscénité de leurs yeux et la veulerie de leur rire ! Beaux pantins d'amour en vérité, avec l'affaissement esquinté de leurs gestes et le démantibulé de leur chic (le chic, un mot hideux qui sied comme un gant neuf à leur allure, affalée, de croque-morts, épanouie, de Falstaff)... Ô mes contemporains, les ceusses de mon cercle, pour parler leur argot ignoble, depuis le banquier juif qui les a eues toutes et racole cyniquement pour l'Affaire, jusqu'au gras journaliste qui a son couvert, lui aussi, chez toutes, mais à de moindres taux, et parle tout haut ses articles, comme je les hais, comme je les exècre, comme j'aimerais leur manger et le foie et le fiel et comme je comprends les bombes de l'Anarchie !"

dimanche 27 juin 2010

Extrait - Cavanna et l'enfance

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Redirection en htm Cavanna n'est pas qu'un journaliste/éditorialiste, il est, ou a été plutôt, un écrivain talentueux. Dans la veine d'un Alphonse Boudard, avec un langage argotique et une certaine nervosité dans les descriptions, ce fils d'italiens dépeignait son enfance de manière admirable dans son livre Les Ritals. L'enfance dans une France en reconstruction, encore bricolée, avec la cruauté du quotidien de ces chers bambins. Une enfance avec ses initiations également. Premiers larcins, premières découvertes sexuelles. Du coup, derrière la virulence du langage, se cache une grande tendresse et un beau livre sur l'enfance.

Dans l'extrait ci-dessous, on peut lire un portrait/critique du narrateur à propos des pêcheurs. Drôle, vif et d'une incroyable justesse. Le regard acéré ou comment critiquer les petites gens, avec intelligence.

 L'écriture, toujours l'écriture

"Sur la Marne, il y a aussi les pêcheurs. Des vieilles merdes qui louent un emplacement avec un piquet pour amarrer une barque plate, peinte en vert, aussi déprimante à voir qu'une pantoufle charentaise. Ils restent là, des plombes et des plombes, à guetter le bouchon, faut avoir de la purée de marrons à la place du cerveau.Et quand ils en sortent un, ces enfoirés, un gardon comme mon petit doigt, je me barre, je les fracasserais à coups de parpaing, je les balancerais à la baille, je sens la colère rouge qui monte. Pourriture de braves gens ! Ils te décrochent la bestiole, la gueule arrachée, la jettent dans le panier de zinc, et là, elle se tortillera bâillera étouffera pendant des heures, tout ça pour que ces connards à bidoche grise, à bajoues et à mégot aient un peu de saine distraction au bon air !"

lundi 21 juin 2010

L'atelier d'écriture - nouveau chapitre du roman

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Un nouveau chapitre de mon roman est en ligne sur My Major Company Books. Je vous mets ici l'accroche du chapitre. Pour lire la suite, il faudra cliquer sur le lien. Le chapitre s'appelle "L'Atelier d'écriture" et projette notre narrateur/personnage dans un atelier de ce type. L'occasion pour lui de se divertir de l'aliénation du travail qu'il effectue chaque jour.

On fait chauffer les neurones

"Je me suis dit que ce n’était pas une mauvaise idée. Du coup, j’ai cherché. Un peu partout, sur Internet, dans les petites annonces du journal. Il me fallait trouver quelque chose, de quoi compenser mes longues journées de boulot par une activité prenante. J’avais choisi l’écriture.
            Le choix n’avait rien eu de cornélien. Trop fainéant pour m’astreindre à une activité physique, j’avais rapidement rayé du champ des possibilités le sport. L’écriture ? Pourquoi pas ? Du moment que ça me permettait de vider ma bile, de souffler un bon coup et de craquer légalement. Peu m’importait le moyen, seule la cause méritait qu’on s’y attarde.
            Pour pouvoir écrire, il faut écrire comme disait Bukowski. Comme je nageais en plein flou, je me suis dit qu’un petit coup de pouce ne serait pas de trop. Au lieu de me coltiner des livres, d’écrire péniblement comme un cheval de trait, l’atelier d’écriture se dressait devant moi comme une option viable et intelligente.
            « Aux belles lettres », sous ce nom un peu niais se cachait en réalité un atelier d’écriture, ouvert à tous, moyennant finance, en plein huitième arrondissement de Paris. C’est plus le hasard qui me décida à jeter mon dévolu sur cette association qu’un choix mûri comme il se doit. Après un coup de téléphone somme toute classique, je me décidai à m’y rendre le lundi suivant, jour de repos du bibliothécaire."


Le lien : http://www.mymajorcompanybooks.com/Auteurs/hassler/

dimanche 20 juin 2010

Extrait - Benjamin Constant et le triangle amoureux

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Redirection en htm Benjamin Constant est surtout connu aujourd'hui pour son roman Adolphe. Une histoire d'amour où se mêlent le cérébral et le sentimental. Même s'il est réducteur de résumer notre ami à ce seul titre, il faut convenir que le-dit livre renferme quelques passages touchants où le style, précieux mais jamais maniéré, arrive à retranscrire ces évolutions infimes des sentiments d'un être en proie à l'amour.

Dans le passage qui va suivre, notre narrateur/personnage évoque la complexité de l'homme et toute la difficulté d'aborder la femme que l'on aime. Simple, juste, touchant.

Benjamin nous parle de l'homme et de sa complexité

"Cette situation se prolongea. Chaque jour, je fixais le lendemain comme l'époque invariable d'une déclaration positive, et chaque lendemain s'écoulait comme la veille. Ma timidité me quittait dès que je m'éloignais d'Ellénore; je reprenais alors mes plans habiles et mes profondes combinaisons : mais à peine me retrouvais-je auprès d'elle, que je me sentais de nouveau tremblant et troublé. Quiconque aurait lu dans mon coeur, en son absence, m'aurait pris pour un séducteur froid et peu sensible; quiconque m'eût aperçu à ses côtés eût cru reconnaître en moi un amant novice, interdit et passionné. L'on se serait également trompé dans ces deux jugements : il n'y a point d'unité complète dans l'homme et presque jamais personne n'est tout à fait sincère ni tout à fait de mauvaise foi."

mardi 15 juin 2010

Bazar littéraire - Céline et l'enfance

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Nouvel épisode après plus jours voire semaines d'attente du bazar littéraire. Au programme, le livre Mort à crédit de Céline. Un témoignage sur l'enfance.


lundi 14 juin 2010

Extrait - Nada et la naissance

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Redirection en htm Pour bien commencer la semaine, je me suis dit qu'il était de bon ton de vous faire découvrir un jeune auteur, il a publié il y a presque un an son premier roman, Nada. Percutant, violent, son livre Hécatombe nous fait suivre la destinée d'hommes et de femmes cherchant à combler le vide de leur existence par l'ultra-violence, la sexe et le drogue. Chacun poussant son vice, sa consommation, jusqu'à la destruction.

L'extrait qui suit n'est autre que l'ouverture du roman, on découvre le personnage de Maxence avant sa rencontre avec un groupe de skinheads.

 Nada en dédicace

"Maxence avait toujours su que sa vie ne lui serait d'aucune utilité.Avant même de le savoir, il l'avait senti, quand sa mère arrivée au terme de sa grossesse avait vêlé dans la chambre climatisée d'une clinique privée.
Il était né sans difficultés, sans trop occasionner de souffrances à sa génitrice suffisamment sereine et concentrée pour laisser son utérus se dilater au maximum. Elle avait poussé, elle avait crié, il était sorti, pas d'anomalie à signaler. Un braillard anodin surgi d'une matrice anonyme lors d'un accouchement sans surprise.

Toutes les conditions requises étaient réunies pour permettre à Maxence d'être broyé par les mâchoires d'une vie atrocement normale. Digéré, puis réduit à l'état de matière par l'estomac d'une existence frigide, il n'avait somme toute qu'à se laisser chier dans la fosse septique urbaine où s'agglutinait, grouillante, la masse en mouvement."

Je signale d'ailleurs que j'ai eu l'occasion de rencontrer l'auteur et que je vais mettre en place sous peu une interview pour lui donner l'occasion de s'exprimer sur son roman, l'écriture et la littérature plus largement.

samedi 12 juin 2010

Moi et My Major Company Books

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Pour ceux qui veulent me lire, au lieu de retrouver des extraits éparpillés, je me suis inscrit au site My Major Company Books. Ce site reste une arnaque, de l'auto-édition déguisée, mais vous permet de mieux me découvrir et me lire.

 La nouvelle mode et moi


J'ai posté le premier chapitre du roman sur lequel je suis actuellement, format pdf, avec la liseuse du site ça passe niquel. Voilà.

jeudi 10 juin 2010

Fin du chapitre, le concert surprise

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La fin du chapitre, Le concert surprise


Ce soir, c'est combat !

"Seulement, je n’étais pas Mère Térésa et mon catéchisme n’était qu’un lointain souvenir. Je la pris par le bras, il fallait bien dégager le passage. A la première secousse, un gémissement. Elle bredouillait des choses complètement inintelligibles. Des sortes de râle de pitié. Son bédot encore à la main, elle avait le bout des doigts calcinés.

A force de garder trop longtemps la précieuse convoitise, cette conne se rôtissait elle-même, en partant des pognes. La colère doublée à une furieuse envie de rendre à César ce qui lui appartient, je soulevai cette blonde décolorée par le col. Mon pantin ne bougeait pas, il se balançait mollement au bout de mes bras. Furieux, je lui assénai une violente droite en pleine face. Une belle manière de rompre avec la fameuse galanterie masculine. K.O en un coup. Tel un Tyson de la belle époque, j’envoyai mon adversaire au tapis avec brutalité.

Sa tête frappa le carrelage des water-closets comme un obus sur une plage de Normandie. Le poc que provoqua le choc me fit découvrir un petit cratère presque mignon. Ma victime, qui venait de perdre une dent, saignait fortement de la bouche. On distinguait une protubérance blanche sortir de la cavité buccale. C’était presque beau.

Par habitude, je commençais à sortir mon sexe pour uriner tranquillement mais c’était sans penser à la redoutable secousse qui vint me rappeler, en un quart de seconde, à peine, le mal dont je souffrais. L’estomac se contractait avec force, la douloureuse sensation de chaud que l’on ressent dans l’œsophage devint plus forte que jamais. A peine le temps d’y penser que la gerbe dorée vint moucheter l’intérieur des toilettes.

Deux violentes secousses me mirent à terre. Sur les genoux, je terminai le boulot commencé. Sale et inutile. A force de raclement de gorges, j’expédiai une grande partie de la pourriture qui stagnait il y a encore quelques secondes dans mon estomac. Nauséeux au possible, en sueur, j’essayais de reprendre mes forces pour pouvoir sortir de ces toilettes et par la même occasion quitter cette assemblée.

Les quelques minutes d’effort qui suivirent me semblèrent durer des heures. Titubant, les jambes en coton, une odeur d’œuf pourri se dégageant de ma bouche, je sortis des toilettes, le salon comme ligne d’horizon. De l'herbe s’étalait sur la table, deux joints tournaient tranquillement pour satisfaire chacun.

Ma montre me signalait qu’il était déjà 3 heures du matin. Il fallait partir. Lucie se rapprochait de plus en plus de Baptiste, les groupies se déshabillaient dangereusement, les autres commençaient à planer. Je me mis dans l’idée de leur dire au revoir, à tous, mais je me retiens de le faire. Mon haleine fatale pourrait me porter préjudice. Et puis, j’ai horreur des joints.

D’un geste de la main, je leur montrai qu’il était temps que je rentre. Leurs gueules béats me répondirent avec un horrible sourire. Je pris la porte en emportant avec moi mon mal de ventre. Soirée de merde."

mercredi 9 juin 2010

Le concert surprise - deuxième suite

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La suite du roman, le chapitre "Le Concert surprise".

Fraternisons mes frères

"Comme tout groupe de la même trempe, les paroles avaient leur importance. « Chansons à texte » précisait Baptiste fier de lui. Apparemment, c’était lui l’auteur de ces saillies. Forcément, idéologiquement très marquées. Il s’agissait de traiter un peu tous les problèmes du monde, les belles causes. Des sans-papiers à la pauvreté, les chansons formaient un tel amas de pathos qu’un diabétique en crèverait rien qu’à la vision de ce galimatias.

Moi je ne mourrais pas, je souffrais en silence. Mon statut d’esthète violemment tancé par ces quelques productions musicales. Assez rapidement, toute l’assistance commença à parler musique, plus précisément du groupe de Baptiste. Fier de lui, tel le Candide de Voltaire, notre brave garçon se lança dans une pénible énumération des tentatives du groupe pour percer.

Ils enchaînaient les sortes de crochets et autres compétitions musicales, dès qu’une salle de concert ou une association mettait sur pied quelque chose qui s’apparentait à ça, le groupe se radinait avec ses dernières productions sous le coude. Malgré la médiocrité ambiante, tout entretien se soldait par un échec. Cuisant et violent.

Je me demandais tout de même comment il faisait, tous, pour vivre. S’ils pensaient vivre de leur « art », mieux valait vivre petitement. Ce qui n’avait pas l’air d’être le cas ici vu l’approvisionnement en bières et pizzas qui formaient désormais une sorte de train lascif de la cuisine jusqu’au salon. La question n’était pas taboue mais était vite éludée, j’eus ma réponse au détour d’une conversation. Ils étaient étudiants.

Tous, Baptiste comme ses camarades. Batteur, bassiste, guitariste la nuit et étudiant le jour. Sans trop faire d’effort, je compris avant même que la chose ne me soit confirmée que papa/maman finançait la vie minable de leurs progénitures. Chacun, le cul bien au chaud, pouvait se permettre de plonger à grandes brasses dans le déni du réel puisque le filin qui les retenait à la surface ne lâcherait jamais. Des parents qui paient l’indépendance de leurs enfants, c’est d’un banal.

La bière, ou plutôt les bières, commençait à faire son effet. Sans être pompette, j’avais le cerveau qui commençait à marcher au ralenti. Typique lorsqu’on ne mange pas en même temps que l’on boit. Du coup, avec un temps de latence plus ou moins grand, j’essayais de suivre les discussions hilares qui m’entouraient sans réussir pourtant à raccrocher les wagons.

A ma droite venait de s’engager un discours philosophico-mystique. Ils parlaient politique avec une naïveté à la hauteur de leur ignorance. Comme des artistes. C’était du Tocqueville sans le talent, du Robespierre sans l’audace, du Marx sans la pertinence. Bref, c’était du rien, du vent, du que dalle.

Pourtant, ils ne pouvaient s’empêcher, groupies, fans comme le groupe, de se pignolaient joyeusement, tous ensemble, dans cette espèce de fraternité répugnante que les gauchistes adorent. Ma seule envie à moi, c’était de me diriger vers les toilettes histoire d’évacuer cette mauvaise bière. Je luttais pour ne pas tout renvoyer, là, maintenant, au milieu de cette instance de joyeux drilles.

J’avais autant envie de gerber que de me lever d’un coup, et beugler, avec force et fracas, mon dégoût pour cette bande de crasseux. "Vous me faîtes chier bandes de cons", je ne le dis pas. Emasculé que j’étais par des années de pacifisme et d’éducation socialisante. Mou du genou, chèvre bêlante, petit médiocre forgée à la lumière du prêt à penser.

Mieux valait éviter l’esclandre, même si la chose me chatouillait de plus en plus. Je préférais me diriger vers les toilettes et faire ma petite affaire. A peine arrivé au lieu-dit, je rencontrai une fois encore la colocataire avec son joint dans les mains. Elle dormait à moitié sur la cuvette des chiottes. Comme cassée."

lundi 7 juin 2010

Le concert surprise - la suite

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Aujourd'hui, j'ai décidé de publier la suite du premier extrait du roman sur lequel je travaille actuellement. Souvenez-vous donc, le narrateur/personnage se retrouve, après un concert d'amis d'une amie, dans l'appartement de l'un des musiciens. Après une visite des lieux, les convives se posent et discutent.


Des groupies déchaînées

"La discussion commença rapidement. Je l’entrecoupais de quelques gorgées de bière. Baptiste se tenait  en face de Cécile. Tous les deux, ils parlaient musique, déliraient gentiment sans se douter que je n’y comprenais rien et que ce communautarisme du rire m’emmerdait profondément. Il y a comme une régression mentale chez certains jeunes qui me donne à vomir. Comme si l’intelligence, la réflexion étaient devenues des gros mots qu’ils faillaient battre à coups de rires imbéciles.

Les autres musiciens étaient dispatchés dans la pièce. Deux sur le canapé, un sur un pouf derrière la table basse. Ils parlèrent du concert bien entendu, de musique, tout en caviardant leurs propos d’un jargon branchouille qui m’était étranger. La soirée allait être longue.  

On sonna, c’était les deux groupies de tout à l’heure. Des poufiasses de premier choix, en total admiration devant ces musiciens de bazar. C'était leur Beatles à eux, sans aucun doute. L’une était brune, assez grosse, avec des lunettes, l’autre affichait une blondeur fadasse doublée d’une maigreur déplorable. Leur jovialité masquait difficilement la vacuité de leurs personnes.

Elles vendaient des colliers de perles à la sortie des concerts du groupe. C'était ça leur but dans la vie. Cette espèce de résidu d'une révolte estudiantine attardée. Une idéologie à peine digne des gogues. Des marginales qui, par un mimétisme dont elles ne se rendaient pas compte, reproduisaient les logiques d’un marché qu’elles critiquaient en le simplifiant à l’extrême. Même pas baisables.

Leurs recettes étaient maigrichonnes, pour ne pas dire risibles. Je dus les embrasser, malgré la forte répugnance que j’avais à poser mes lèvres sur ces joues suintantes de gauchistes. La brune portait une de ces écharpes pleine de couleurs et de discrétion comme on en fait de nos jours. L'autre arborait un bandana rouge, noué autour de son poignet. C’était le genre de connes à parler avec effusion de la liberté, sans comprendre que le libre arbitre c’est le degré zéro de la liberté.

Elles s’assirent à côté de moi, sur le canapé. Elles ne pouvaient s’empêcher de rire aux éclats à chaque fois qu’on leur adressait la parole. Comme une mécanique non justifié mais incontrôlable. Je m’efforçais d’afficher un sourire, en dépit de ma nervosité, pour ne pas trop jurer dans cette assemblée de festifs.

Pour créer une ambiance, comme il aimait à le dire, Baptiste venait de lancer un CD des dernières compositions du groupe. Pas encore connu, mais bourré de talent. Il nous l’assurait avec une telle conviction qu’on ne pouvait que rallier son jugement. Le style, s’il fallait le définir, empruntait à beaucoup d’univers existants. Une sorte de melting-pot foutraque où se retrouvait autant la chanson réaliste à la française que des sonorités africaines ou encore un rock calibré jeunes bourgeois"

Extrait - Paul-Louis Courier et la liberté d'expression

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Redirection en htm Fouillant dans les abysses de la littérature, je suis tombé il y a peu sur un personnage aujourd'hui complètement oublié mais diablement intéressant. Son nom, Paul-Louis Courier, pamphlétaire de son état, libéral et anti-clérical en cette fin de 18ième siècle, début 19ième.

Totalement en marge de l'idéologie dominante de son époque, notre homme ne fournit malheureusement que quelques œuvres mineures. Des opuscules littéraires, des lettres et des pamphlets. Pourtant, lorsqu'on lit Le Pamphlet des pamphlets , on découvre le passage que j'ai retranscrit ci-dessous. Une vision de la liberté d'expression reposant des principes libéraux, très anglais, et une certaine idée d'une collectivité pensante et agissante. Chacun corrigeant et proposant pour permettre d'affiner les recherches. Et puis, lorsqu'on lit la description des ennemis de cette expression pleine et entière, on ne peut penser qu'à notre intelligentsia actuelle qui squatte gentiment les plateaux de télévision. Forcément, tellement pertinent.

Paul-Louis, un pamphlétaire oublié

"Laissez dire, laissez-vous blâmer, condamner, emprisonner, laissez-vous pendre; mais publiez votre pensée. Ce n'est pas un droit, c'est un devoir, étroite obligation de quiconque a un pensée de la produire et mettre au jour pour le bien commun. La vérité est toute à tous. Ce que vous connaissez utile, bon à savoir pour un chacun, vous ne le pouvez taire en conscience. Jenner qui trouva la vaccine eût été un franc scélérat d'en garder une heure le secret; et comme il n'y a point d'homme qui ne croie ses idées utiles, il n'y a point d'homme qui ne croie ses idées utiles, il n'y en a point qui ne soit tenu de les communiquer et répandre par tous moyens à lui possibles. Parler est bien, écrire est mieux; imprimer est excellente chose. Une pensée déduite en termes courts et clairs, avec preuves, documents, exemples, quand on l'imprime, c'est un pamphlet et la meilleur action, courageuse souvent, qu'homme puisse faire au monde. Car si votre pensée est bonne, on en profite, mauvaise on la corrige et l'on profite encore. Mais l'abus...sottise que ce mot; ceux qui l'ont inventé, ce sont ceux qui vraiment abusent de la presse, en imprimant ce qu'ils veulent, trompant, calomniant et empêchant de répondre. Quand ils crient contre les pamphlets, journaux, brochures, ils ont leurs raisons admirables. J'ai les miennes et voudrais qu'on en fît davantage, que chacun publiât tout ce qu'il pense et sait!"

mardi 1 juin 2010

Extrait - Houellebecq et l'amour physique

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Redirection en htm Michel Houellebecq a une marotte bien à lui : le désir et la sexualité  Bien que romancier, Michel a su comprendre intelligemment toute la lutte qui pouvait découler de ces deux points essentiels. Une lutte comme celle se faisant dans le domaine économique. Une moyen de différenciation, de quoi constituer des échelles de valeurs sur lesquelles on placera délicatement les hommes.Pour reprendre le titre du premier roman de Houellebecq, on peut dire que la lutte des classes (lutte économique) se poursuit par la lutte pour une sexualité épanouie. "L'extension du domaine de la lutte". Posséder, être un jouisseur.

Dans l'extrait qui suit, tiré de La Possibilité d'une île, le narrateur nous parle de l'amour physique. Élément fondateur de la relation et surtout d'autres types de relation. C'est bien ce qui est cruel et terrible. Puisque les critères nécessaires pour cet amour physique nécessitent des qualités humaines, physiques aussi forcément, qui déclinent avec l'âge. D'où l'angoisse de la pénétration, l'âge passant.

Michel est jouisseur qui doute

"Lorsque la sexualité disparaît, c'est le corps de l'autre qui apparaît, dans sa présence vaguement hostile; ce sont les bruits, les mouvements, les odeurs; et la présence même de ce corps qu'on ne peut plus toucher, ni sanctifier par le contact, devient peu à peu une gêne; tout cela, malheureusement, est connu. La disparition de la tendresse suit toujours de près celle de l'érotisme. Il n'y a pas de relation épurée, d'union supérieure des âmes, ni quoi que ce soit qui puisse y ressembler, ou même l'évoquer sur un mode allusif. Quand l'amour physique disparaît, tout disparaît; un agacement morne, sans profondeur, vient remplir la succession des jours. Et, sur l'amour physique, je ne me faisais guère d'illusions. Jeunesse,beauté, force : les critères de l'amour physique sont exactement les mêmes que ceux du nazisme. En résumé, j'étais dans un beau merdier."