mercredi 15 juin 2011

Extrait - Jean-Claude Michéa et le libéralisme

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Jean-Claude Michéa est un penseur actuel d’une grande vivacité et d’une grande pertinence. Réhabilitation de la pensée politique d’Orwell, fine réhabilitation, l’homme est surtout connu pour sa critique du libéralisme avec un ouvrage comme L’Empire du moindre mal, complété par Retour sur la question libérale, comme pour mieux consolider les éléments négligés.

Philosophe jargonnant un peu, mais pas trop, il n’en demeure pas moins en constante prise avec le réel grâce à la mobilisation de sources concrètes (ses notes forment presque un livre à part entière). Si l’abstraction est nécessaire dans un tel discours, on manipule avant tout des notions, elle n’est jamais laissée seule, comme une étrange nébuleuse. L’extrait ci-dessous, tiré de L’Empire du moindre mal, n’est rien moins que la conclusion de l’ouvrage. Une conclusion forte et juste.



« Le nouvel ordre humain que les élites libérales sont désormais déterminées à imposer à l’échelle de la planète, exige, en effet, que les hommes cessent précisément de « se sentir hommes » et se résignent enfin à devenir de pauvres monades égoïstes, condamnées à produire et consommer toujours plus, chacune luttant impitoyablement contre toutes les autres, dans l’attente de son hypothétique « quart d’heure de célébrité ». Hannah Arendt avait donc parfaitement raison de souliggooglener, dans La Condition de l’homme moderne, que « ce qu’il y a de fâcheux dans les théories modernes ce n’est pas qu’elles sont fausses, c’est qu’elles peuvent devenir vraies ». S’il est ainsi toujours exact que l’homme n’est pas égoïste par nature, il est non moins exact que le dressage juridique et marchand de l’humanité crée, jour après jour, le contexte culturel idéal qui permettra à l’égoïsme de devenir la forme habituelle du comportement humain. Les partisans de l’humanité seraient donc malvenus de sous-estimer cette réalité nouvelle. Ils doivent impérativement prendre conscience, au contraire, que la course est déjà commencée et que, dans cette course, le temps jour maintenant contre eux. »

mercredi 8 juin 2011

Extrait - Traven et les colons espagnols

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Traven est un romancier mystérieux. Brouillant volontairement les pistes, écrivant sous des noms d’emprunt, disparaissant, réapparaissant sans cesse. Son idée était de promouvoir non sa vie mais son œuvre, d’où ce flou savamment entretenu. Allemand d’origine, Traven n’en demeure pas moins un amoureux du Mexique se dévouant corps et âme à critiquer les colons espagnols et défendre ce petit peuple qu’il chérissait tant.

La Révolte des pendus est considéré comme son chef d’œuvre pour beaucoup de lecteurs. Dans ce récit, le lecteur suit la lente révolte de Mexicains encore sous le joug de colons espagnols. Le climat devient de plus en plus délétère, les forces contestataires s’organisent. Pendre pour mieux mater ce peuple exploité ne suffit plus, d’événement en événement, les bûcherons mexicains fomentent un soulèvement radical et suicidaire. Le passage ci-dessous retranscrit, dans la bouche de l’un des exploitants espagnols, tout le mépris, l’avidité du profit, de ces entrepreneurs. Une vision certes caricaturale, sans nuance, mais complètement assumée par Traven. En clair, une charge politique au sens large.



« Nom de Dieu d’enfants de garces ! Tas de salauds puants et dégueulasses que vous êtes. C’est comme cela que vous me volez mon argent que j’ai eu tant de mal à gagner ? C’est comme cela que vous le faites valser à boire et à courir les filles et que pendant trois mois, trois longs mois où vous auriez eu le temps de travailler pour moi, vous n’avez rien foutu, même pas fait partir un seul convoi de caoba ? Pourtant, le bon Dieu et la Sainte Vierge en sont témoins, je vous ai toujours payé vos gages, je ne vous dois rien, tas de boucs putassiers, et je n’ai jamais été en retard à payer son dû à celui qui faisait son travail. Et maintenant, j’arrive au bout de trois mois, et il n’y a rien de rien aux tumbos : pas un brin de caoba qui vaille la peine qu’on en parle ! Moi qui croyais en trouver haut comme des montagnes ou du moins comme la cathédrale de Villahermosa, je ne trouve rien ou guère plus. Mais, bon Dieu de bon Dieu et par tous les saints du bon Dieu, je me demande ce que vous avez bien pu foutre pendant tout ce temps, voyous que vous êtes. Vous avez dû passer vos journées à forniquer, à vous torcher vos sales museaux, à vous soûler la gueule et à poser culotte ! Allez-vous répondre, tonnerre ? Et pas de mensonges, hein ! Sinon, je vous défonce la mâchoire, tas de golfos, de détrousseurs de cadavres pestiférés. Alors qu’avez-vous à répondre ? »