Des jeunes auteurs français intéressants, drôles et pertinents, il faut bien le dire, c’est rare. Julien Blanc-Gras, sans être une pointure stylistique, un analyste très fin, demeure un romancier atypique dans le paysage actuel. S’attaquant au libéralisme et à ses déclinaisons, l’homme prend un malin plaisir à détricoter, à travers des écrits singuliers, son époque.
Dans Comment devenir un dieu vivant,
Julien Blanc-Gras imagine une fin du monde inéluctable. Avant
l’avènement de celle-ci, le narrateur, futur dieu vivant, met en place
un discours qui ne tardera pas à devenir un phénomène de mode. L’idée,
non pas empêcher la fin du monde mais l’accompagner, qu’elle se fasse «
en douceur ». Dans l’extrait ci-dessous, le romancier propose une
lecture, pas foncièrement originale, mais assez pertinente, des people. Des divinités permettant l’instauration de rites fédérateurs et rassurants.
« Dieu
est rusé. Son génie, c’est de ressusciter sous des formes incongrues à
la faveur du chaos (sectes, kamikazes, papes allemands…). Prenez le
peopolisme, cet avatar clinquant de la pop culture. Le culte le plus
flagrant de l’époque. Chaque semaine, les magazines où l’on apprend que
Johnny Deep aime le brocoli sont plus lus que la Bible ou le Coran.
Cherchez : quel leader religieux est plus influent que Madonna ? Le
peopolisme réenchante un monde qui en a besoin, lui propose une magie,
certes grotesque, mais rudement efficace. A travers des icônes et des
rites, la foule exaltée crée son lien avec une sphère supérieure. Les
people, c’est un clergé qui habite l’Olympe. Nos dieux ont recours à la
chirurgie esthétique et ils mangent bio. Parfois, ils sauvent un enfant.
Le reste du temps, ils nous racontent des histoires qui apaisent les
nôtres. »
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